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13/02/2023 Le jean, éternel symbole de la vitalité de la mode

Les mythes du blue jean

 

Selon la légende, l’histoire du jean, commence aux États-Unis durant la conquête de l’Ouest. Un homme prénommé Levis Strauss aurait croisé dans un bar un chercheur d’or réclamant des pantalons de travail adapté. Puis, ce même Levis Strauss aurait scellé un contrat avec Jacob Davis, inventeur des rivets en manque de toile textile, sans qui rien ne serait arrivé. D’un point de vue géographique, et même mythologique, les origines de ce vêtement universel sont encore plus complexes. Il y a la ville de Nîmes en France et sa célèbre « toile Denim » bien sûr, mais aussi les pays du sud du continent africain au sein desquels le jean a pris toute sa valeur culturel tant il a symbolisé le modernisme et l’accès à la richesse. Dans l’ouvrage de Daniel Friedmann (Une histoire du blue jean, éd.Ramsay, 1987), l’anthropologue affirme même que les pays de l’est de l’Europe ont donné sa connotation rebelle au pantalon de toutes les jeunes générations. Toutes ? C’est à nuancer. Car avant de devenir le vêtement phare dans la contre culture des années 1960, le jean était un symbole de travail et de déplaisir. De pragmatisme certes, mais de prolétariat surtout. Et, bien qu’il s’agisse du vêtement le moins uniforme au monde – tant sa toile s’adapte à chaque corps et sa couleur indigo évolue – le jean a même été uniforme carcéral aux États-Unis. Ce n’est donc que dans les années 1960, et premièrement aux États-Unis, que le jean change de forme et de phase mythologique pour devenir le symbole de toute une jeunesse refusant les guerres, les normes de genre, et nombre d’inégalités alors en cours dans la société occidentale. Sans le jean, pas de féminisme. Pas de hippies. Pas de mouvement gay. Ni même de lutte anti-raciste. Le jean est l’uniforme protéiforme du changement.

Le jean est devenu l’emblème à la fois individualiste et collectif d’un monde qui change. Un monde qui, aujourd’hui encore, connaît les mêmes types de revendications portées par de nouvelles générations, mais au sein duquel le jean a tracé sa propre route et s’est même taillé une place de choix, au point de courir les Fashion Week et autres podiums des défilés. Retour sur une histoire de mode pas comme les autres.

 

Le jean, histoire d’un intemporel de mode

 

Si Yves Saint Laurent démocratise le pantalon pour femme en introduisant en 1967 le premier costume féminin, soutenant par la même le droit des femmes à s’habiller comme elles le souhaitent, c’est à Jean-Paul Gaultier que l’on doit l’intronisation du jean dans les cercles de mode. Après avoir habillé les hommes en jupe en 1984, il s’attaque aux vêtements du quotidien et connoté anti-mode tel le bon vieux jean. En 1992, celui qu’on surnomme « l’enfant terrible de la mode » lancera même une gamme Gaultier Jeans. Étonnement, ses prédécesseurs des années 1960, spécialistes de la mode futuriste, que sont Pierre Cardin et André Courrèges n’avaient pas vu venir cette matière en tant qu’éternel symbole de l’intemporalité. En revanche, le couple de créateurs Marithé et François Girbaud, qui se rencontrent à Saint-Tropez durant les années 60, se sont attelés à l’exploration du jean en tant que véritable pièce mode dès 1964. Comme ils le disent eux-mêmes : « Nous sommes les hippies de 68. Nous avons tracé des lignes dans la matière [denim] qui sont devenues une écriture, des codes pour beaucoup, de ce qui allait tour à tour s’appeler « arraché, délavé, bleached, used, stone whased,… » ». Dès 1972, ils ouvriront des boutiques à travers le monde au point que le journal Le Monde dira des créateurs que, grâce à leur jean, ils marquent l’histoire de la mode. Aussi, le grand couturier franco-tunisien Azzedine Alaïa et premier Président de la Maison Mode Méditerranée, en adepte des chemises blanches qu’il insérait dans chacune de ses collections, proposa des jeans pour les assortir tout au long de sa carrière.

 

 

En 1999, lorsque la Maison Mode Méditerranée initie l’exposition dirigée par Olivier Saillard « Mouna Ayoub, parcours d’une collectionneuse » consacrée aux vêtements de cette grande cliente de Haute Couture, est présentée au Musée de la Mode de Marseille une magnifique robe bustier au tombé sirène en jean appartenant à la collection Couture Jean Paul Gaultier 1999.

 

Quelques année plus tard le musée de la mode présente la première monographie de l’artiste protéïforme et plasticienne. Née à Marseille « Fred Sathal Créatures », elle explore l’usure et le délavage de la toile de Jeans qu’elle pare de fil et de sequins. Une esthétique qui offre à ses clientes la possibilité d’échapper à l’uniformité de se placer en dehors de la tendance.

 

C’est également le jeans que choisit Demna, Directeur Artistique de la maison Balenciaga, en relancant la ligne Couture de la marque en 2020. Après cinquante trois ans d’arrêt – depuis que le fondateur espagnol Cristobal Balenciaga avait considéré la couture comme tuée par le prêt-à-porter – , Demna ré-introduit l’art de la Haute Couture dans la maison en faisant la part belle à la toile denim. Entre ces deux grands évènements marquants pour la mode contemporaine, de l’introduction par Jean Paul Gaultier à la consécration par Demna, le jean a traversé l’histoire de la mode et particulièrement celle de la mode méditerranéenne. Aujourd’hui, de nombreux créateurs issus du continent liquide travaillent cet héritage hors-norme pour renforcer les dimensions universelle et malléable de ce vêtement mythique.

Le blue jean en Méditerranée

En France, la marque Kaporal a fait du jean son emblème et travaille désormais à produire une mode éco-responsable en étroite collaboration avec de jeunes créateurs.
Ainsi, en 2021, c’est le créateur Louis Gabriel Nouchi, lauréat du Grand Prix de la Mode du Fonds de Dotation Maison Mode Méditerranée, qui collabore avec la marque marseillaise autour d’une collection dite « unisexe » qui revisite le jean à travers des modèles oversize, blancs, ou encore patchwork. Cette quatrième collection d’upcycling impulsée par Kaporal a une nouvelle fois été produite au sein des ateliers de ré-insertion 13 A’TIPIK.

Actuellement, c’est une collection de vêtements en denim patchwork que la marque Kaporal propose, imaginée par le créateur portugais et boursier du Fonds de Dotation MMM Luis Carvalho.

Toujours depuis la cité phocéenne, la créatrice Flore Girard de Langlade (boursière du Fonds de Dotation Maison Mode Méditerranée 2020-2022) a longtemps réalisé des collections entièrement basées sur le travail du denim. En 2021, elle collabore même avec la marque Libertador Colombie pour la réalisation d’une collection de pièces uniques en jean.

En Israël, la marque Hannah (lauréate OpenMyMed Prize 2017), fondée par Nir Goeta et Rotem Mitz-Goeta cultive un aspect résolument mode du vêtement indigo : le total look. À partir des années 1980, le jean ne se porte plus seulement en pantalon mais s’affiche sur l’ensemble de la parure via les célèbres vestes Levi’s et Lee Cooper. Depuis, les marques de mode à proposer des silhouettes entièrement en jean sont nombreuses. Hannah, dont les membres fondateurs sont passés par la Maison Margiela, développe ainsi une esthétique workwear autour du denim. Par des coupes à la fois légères et minimales, les gammes « essential » et « double denim » revisitent le power dressing, renouant avec la première fonction mythologique de ce vêtement pas comme les autres : la vie active.

 

Aussi, toujours en Israël, la marque TRES, fondée par le trio Noy Goz, Noa Gur, et Dafna (lauréats OpenMyMed Prize 2018) explore ces basiques du vestiaire féminin avec un certain penchant pour le denim. Toutes trois diplômées du Shenkar Fashion Design School de Tel Aviv en 2012, elles fondent leur marque en 2014 et y insèrent des total look jean très rapidement, au point de lancer une gamme TRESxDenim. L’historique couleur indigo est parfois remplacée par le gris clair ou encore un bleu blanchi.

 

Mais la créatrice qui entretient cette héritage indigo dans tout son travail artisanal n’est autre qu’Anaïs Guéry. Lauréate de l’OpenMyMed Prize en 2016, Anaïs Guéry est diplômée de l’Institut Français de la Mode (IFM), des Arts Décoratifs de Paris, et du London College of Fashion. Lorsqu’elle lance sa marque A.Guéry en 2014, son souhait est de mêler des expérimentations artistiques inspirés par d’autres univers culturels à un travail de haute couture. Tout son processus créatif a pour point de départ l’indigo et ses multiples présences, plus ou moins naturelles, parfois artificielles, dans l’environnement. Récemment, Anaïs Guéry a lancé le projet (et compte Instagram) re.tabli pour lequel elle revisite les basiques du vestiaires masculins et leurs évolutions, en version indigo bien sûr.

 

Ce bleu azuréen, profond, qui inspire nombre de créateurs de Méditerranée n’a pas échappé à l’oeil de la désormais célèbre Valentine Gauthier, fondatrice de sa marque éponyme. Pour sa collection Automne/Hiver 2021, elle optait pour une version souple du denim, revisité à travers des chemises à col lavallière. Un bleu aux multiples teintes donc, que Sakina M’Sa, première lauréate de la Maison Mode Méditerranée ré-interprète en hommage à ses racines marseillaises dans les collections de sa marque 100% éco-responsable.

 

Enfin, parmi les jeunes créateurs du Fonds de Dotation MMM, c’est la créatrice tunisienne Anissa Meddeb qui renforce la dimension éclectique du jean. Inspirée à la fois par ses origines tunisiennes aussi bien que par sa passion pour les kimonos et autres vêtements traditionnels japonais, la lauréate OpenMyMed Prize 2018 développe le jean sous toutes ses coutures : en patchwork, en tunique, en robe et même en burnous. À travers les créations pour sa marque Anissa Aida, cette ancienne étudiante de la Parsons et de la Central Saint Martins renforce l’universalisme de la toile denim et ses origines multiples sans cesse re- visitées.

 

Les derniers chiffres de mode sur l’année 2022 et les analyses qui en découlent témoignent d’une baisse des achats de jeans en 2023, excepté pour ceux qui seraient griffés des plus grands noms du luxe. Une baisse des ventes de jeans n’a pas le même sens qu’en ce qui concerne les autre articles de mode. En effet, le jean a fait sa renommée sur sa robustesse. Il n’y a encore pas si longtemps au vingtième siècle, les personnes ne possédaient qu’un seul jean. Alors, certes, dans les années 1970, quasiment tous les habitants de la terre possédaient un jean. Mais seulement un. Bien sûr, cette baisse est dû au retour de la tendance des pantalons de costume ainsi qu’à celui des mini-jupes impulsé par la marque Miu Miu qui a popularisé la jupe effet school girl en version beige et bords francs. Mais le jean est un vêtement indémodable en ce sens qu’il dépasse les modes et les surpasse toujours. Quand il n’est plus une priorité d’achat, cela signifie qu’il est porté pour des occasions plus intimes, ou même nouvelles, là où il était encore peu arboré. Mieux : puisque personne ne peut vivre sans son jean favoris, serait-ce un signe d’un retour à la qualité dans la production du denim au point que son renouvellement soit ralenti ? Par ces teintes bleus multiples, qui évoque les nuances naturelles et architecturales de la Méditerranée, le jean continue de passionner les jeunes créateurs qui voit en cette toile denim un potentiel intemporel, patrimonial, et culturel jamais égalé.

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